Réalisé par Avec Sandra Hüller, Milo Machado-Graner, Swann ArlaudPays: Genres : Crime, Drame, Mystère Durée : Année de production : |
| 7.75/10 |
Justine Triet fait partie de ces réalisatrices dont l’évolution de carrière est intimement liée au Festival de Cannes. Repérée à l’ACID en 2013, à la Semaine de la Critique en 2016 et en Compétition officielle en 2017, la cinéaste réalise un parcours sans faute pour venir décrocher sa palme d’or cette année.
Exploitant de nouveau une figure féminine pour son quatrième film, la réalisatrice va réécrire les codes du genre en reconstituant avec précision et finesse une enquête judiciaire suite à l’unique question qui gravite autour d’un mort : meurtre ou suicide? Anatomie d’une chute décortique alors tous les angles possibles et inimaginables de l’enquête en frôlant l’impudeur notamment lorsqu’il est question d’aborder la vie intime du couple. La fameuse chute du titre ne représente finalement pas la mort présentée en introduction, mais la déchéance d’un couple au fil du temps. Avec un point de vue totalement externe, l’écriture habile du scénario permet de placer le spectateur en tant que juré d’assises, en plein cœur de l’enquête. Doublant d’intelligence, la conclusion n’appartiendra alors qu’au spectateur qui définira, lui seul, si l’héroïne, Sandra, est coupable ou non.
La reconstitution est incroyable, rien n’est laissé au hasard. D’un détail phonique à une trace balistique, tout est analysé par la science, la simulation, la reconstitution et l’interprétation. À travers ce film qui ne dévoile finalement qu’un fait divers, on comprend ainsi mieux le temps des enquêtes judiciaires qui paraissent parfois « trop » long donnant toute sa légitimité à la justice, quand elle n’est pas deux vitesses. Seul, le dernier acte est un peu faiblard, avec le témoignage du fils qui reviendra à la barre pour dévoiler un ultime témoignage, protecteur et touchant, mais qui se basera plus sur l’amour d’un fils pour sa mère, qu’un véritable indice tangible pour compléter l’enquête.
Du côté des interprétations, tout ce petit monde est convaincant. Sandra Hüller est à la fois froide et bouleversante. Seule sa complicité avec son avocat ne semble pas toujours très naturelle. Milo Machado Graner, le jeune garçon ayant une déficience visuelle, est perturbant tellement son jeu est juste, que ce soit dans ses expressions ou ses dialogues. Enfin, Antoine Reinartz, l’avocat de la défense, incisif et rigoureux réalise une interprétation habile et terriblement combative. Ainsi Justine Triet parfaire son sujet avec des acteurs de qualité.
Très bon film dramatique dont l’évolution boulversante est réaliste et accrocheuse. Maintenant la question est d’y entrevoir ou non du grand cinéma ? Est-ce que l’ensemble méritait une récompense suprême à Cannes ?
Vous avez deux heures…
