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Présenté à la Quinzaine des réalisateurs, De Humani Corporis Fabrica ouvre le corps au cinéma. Des images impressionnantes sous la peau font de ce documentaire une œuvre totalement expérimentale, en tout cas à Cannes.
Cette aventure intérieure est à la fois fascinante mais tout autant horripilante. Les images sont souvent repoussantes montrant les profondeurs longtemps insondables du corps humain. Mais il faut bien reconnaître que le film, principalement conçu à partir d’images d’endoscopie, a de quoi tournebouler quelques estomacs. La caméra va donc plonger impitoyablement dans la chair pour nous montrer de quoi sommes nous faits.
Les différents voyages dans les organes s’accompagnent de mini-caméra et de micro-pinces robotisées qui viennent chatouiller nos organes, jusqu’à y introduire un petit sac refermable pour y déposer une cellule cancéreuse dedans. C’est bluffant de voir qu’un geste à l’extérieur du corps est retranscrit avec minutie par voie interne parce que la technologie existe. D’une diversité et d’une précision jamais approchée, en tout cas pour une diffusion autre que spécialisée, ces images ont surtout cette vertu qui est elle absolument inédite de connecter par un sidérant travail de montage les images filmées par les réalisateurs et celles enregistrées par les machines.
L’opération de l’œil va rapidement nous fasciner, toujours dans l’éventualité que le spectateur ne tourne pas lui-même de l’œil. La précision des gestes pour ouvrir l’organe est incroyable. Si la chirurgie rétractive s’avère bénigne aujourd’hui, elle dévoile une avancée technologique incroyable dans la petitesse des outils, sous la cornée pour y introduire un corps étranger. L’homme 2.0 est déjà crée! Cependant avant d’être totalement »bionique », il va falloir naître! Et, la scène de l’accouchement est quant à elle très barbare, en totale contradiction avec les images hi-tech vues précédemment. Avec l’urgence de la situation, on voit des sages-femmes qui réalisent des gestes quotidiens que nous ne sommes pas toujours à même de comprendre. Mais nous tenterons d’y entrevoir des gestes qui « aident » à donner la vie.
Au-delà des images interne de notre corps, le film tente de laisser une morale, un message. La santé publique constituée elle aussi de différents corps (de métier) va dévoiler toute sa souffrance. Les réalisateurs en profiteront pour dénoncer gentiment le mal-être à l’hôpital par le manque de moyens dans ses organes internes, architecturaux et humains. A travers différentes interviews et voix-off, ce bon petit cours d’anatomie va être confronté aux décisions politiques déconsidérées. On regrettera finalement que le film ne reste pas qu’à son rang d’expérimentation cinéma et chirurgicale, surtout au regard de la qualité suspensive de l’introduction et de sa conclusion à rallonge, dansante et totalement inutile!
Au-delà du message politique, la fascination des outils chirurgicaux contrebalancera les écœurantes images internes du corps humain. Une drôle d’expérience au cœur du milieu hospitalier.