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Au delà de l’instructive rencontre avec le psychologue Jamal Abdel-Kader à Cannes, État Limite dévoile, à travers les images captées par Nicolas Peduzzi, déjà fidèle à l’ACID, la déshumanisation des hôpitaux qui fait des ravages tant au moral qu’au physique des soignants. Le documentaire du cinéaste ne dévoilera rien de nouveau sur ce mal-être qui touche le milieu hospitalier. On sait depuis bien trop longtemps que les moyens ne sont plus là et que la productivité au détriment de l’humain est devenue un fardeau dans la prise en charge des patients. Jamal pointe encore plus cette incohérence sur des maladies qui sont toutes aussi variées que socialement lourdes et que l’accompagnement est la clé de la réussite de ce métier.
Comment trouver les mots dans des situations de détresse extrême ? Jamal signera une ode à humaniser cette instance publique en plein effondrement. Jamal est cette clé de voûte qui tente de supporter sur ses épaules un système qui s’essouffle et que l’on n’écoute plus. Jamal est le cœur battant d’État limite, ce super psychologue, pédagogue, idéaliste, humain qui tentera, par sa jeunesse et son optimisme, de défendre sa vocation. Mais jusqu’à quand ?
Le tourbillon ne semble jamais s’arrêter, la mise en scène sur le vif dévoile parfois des plans maladroits, des flous qui gênent, une caméra qui semble ne pas vouloir s’arrêter. L’accalmie se fait via des belles photographies en noir et blanc. Le film est un reflet sans fard, sans romancer, sans broder. Jamal et ses comparses évoquent la déconstruction de vocation de la fonction publique : « Vous remplissez une case vide », avec des termes parfois éloquents et remuants : « Ils n’en ont rien à faire si les patients meurent, si vous, vous mourez ». Des mots difficiles qui représentent le portrait d’un système exsangue, épuisé essentiellement par des décisions politiques.
Le documentaire n’est qu’un énième reportage sur l’hôpital, mais qui sera porté par un homme bon et qu’on aimera féliciter. État limite cherche et trouve avec succès ce qui reste d’humain dans le milieu hospitalier. Alors merci Jamal!