Réalisé par Avec Max Boublil, Alice Isaaz, Noémie LvovskyPays: Genres : Comédie Durée : Année de production : |
9/10 |
Incroyable! Il faut être né en 1980 pour comprendre totalement le film. On pourra assurément s’y reconnaître et trouver cette démarche originale et géniale que si on a connu cette époque, encore plus durant notre enfance. Play équivaut à l’étrange sensation d’avoir laissé en gage les archives de sa mémoire à un parfait inconnu afin qu’il vous les fassent revivre sur grand écran avec d’autres visages. Et pourtant le film n’a pas réellement de scénario si ce n’est le fil rouge entre Max et Emma. Il ne fait que partager des moments de vie… de notre vie! Le casting est très juste et le choix des acteurs est formidable. Comme s’ils faisaient partie de notre mémoire. Max est excellent, Emma attendrissante, Mathias très drôle et Arnaud passionné.
Oubliant un temps qui n’existait pas, loin des smartphones et des partages de vidéos, l’idée était d’allumer le caméscope pour mémoriser l’insolite, l’inhabituel, comme si on devenait, sans le savoir, « l’attrapeur » du temps. Chaque minute, chaque seconde, j’ai pu m’identifier au personnage de Max. Déroutant d’en voir autant de similitude. Habitant avec sa grande sœur et sa maman, à l’âge de 13 ans, le personnage principal s’amuse avec le caméscope familial pour réaliser des films amateurs et enregistrer chaque moment important, drôle ou inutile d’une vie.
Qui n’a pas réalisé ses effets de disparition en laissant la caméra fixe pour s’amuser à se faire disparaitre d’un claquement de doigt? Qui n’a pas rampé au sol faisant l’illusion de grimper des sommets? Qui n’a pas rêvé de réaliser une séquence de Street fighter avec ses petits moyens, pensant qu’on avait réalisé la séquence du siècle, sans savoir que des milliers d’autres adolescents faisaient la même chose de leur côté. Le réalisateur Anthony Marciano réalise un tour de force en puisant des souvenirs que l’on imagine évidemment personnels et leur faire acquérir une forme d’universalité pour toucher toute la génération ayant grandi à cette époque. Chaque délire de montage amateur de l’époque nous remémore des instants inoubliables, conservés, comme Max, sur des vieilles k7 Hi-8. Et ce fameux « nightshot » qui nous permettait de réaliser des séquences dans le noir, une technique que les moins de 20 ans ne comprendraient même pas!
Les décors sont exceptionnels, jusqu’à se renseigner sur la production du film pour savoir si les images n’étaient pas des archives. Entre le vieux biactol posé sur la tablette ou la montre géante accrochée au mur, il n’y a pas de doute, nous sommes bien dans les années 80’s! Et encore on pourrait passer des heures à se remémorer ses moments de gourmandises à bouffer des Raiders, écouter son walkman, scruter le minitel de mamy, épier les conversations de sa sœur sur le téléphone filaire, jouer aux puces ou coller des cartes Panini et se lever tous pour une Danette!
Bref, revenons au film. Max grandit, comme nous avons aussi grandi, avec notre première boite « refoulée » avec nos belles chaussures cirées, notre première cuite, la folie de la coupe du monde 98, ce fameux bruit de connexion internet AOL mémorable, notre premier baiser… Puis le format du film change, le numérique (mini DV) arrive, il est temps de quitter la maison et affronter la vie, s’écarter de certains amis, pensant qu’ils nous quitteront jamais. Vint les moments de doutes et d’expansion de vie, de l’apprentissage du théâtre, des galères et des rires. Du passage à l’âge adulte avec un premier enfant, puis la séparation, puis un second enfant avec une seconde femme avec ce réconfort de dire que nous avons accompli beaucoup, comme si le « meilleur » avait été vécu. Putain, mais ce film est un copier-coller de ma vie!
Même avec les meilleurs a priori du monde, on ne s’attend pas à une telle petite pépite capable de déclencher une euphorie mémorielle de tous les instants, une virée en grand huit dans notre passé où chaque sommet serait synonyme de la résurgence d’une émotion profondément enfouie. Alors que l’on revisionne déjà mentalement les cassettes de Max en sortant du film, on se surprend en parallèle à souffler sur la poussière des nôtres, endormies depuis longtemps sur une étagère, avec une furieuse envie de les redécouvrir… laissant place à une forte nostalgie remplie autant de larmes que de rires!
Play est incontestablement le reflet d’une génération, un film profondément nostalgique… une véritable claque pour tous les gens qui vont souffler leurs 40 bougies cette année! Merci Anthony Marciano pour cette rétrospective très personnelle et pourtant si universelle! Une belle claque!